Contribution du SNTL au GT4 dé-carbonation des VUL (feuille de route art. 301)

Le SNTL est co-rapporteur d’un groupe de travail (GT4 VUL) piloté par la DGITM (Direction générale des infrastructures, des transports et de la Mer) du ministère de l’Ecologie, dans le cadre de la feuille de route dé-carbonation des transports de marchandise. La 1ère réunion de ce groupe de travail avait lieu le vendredi 18 novembre par visio-conférence. Le SNTL a élaboré un document de travail, avec ses éléments de réflexion concernant la dé-carbonation des VUL.

Document de travail

Contribution SNTL au GT4 dé-carbonation des VUL (Véhicules Utilitaires Légers)

Le SNTL, Syndicat National du Transport Léger, représente des entreprises de transport du dernier km, qui opèrent avec des véhicules de moins de 3,5 t, des cycles à tous types de véhicules utilitaires légers.

L’enjeu de la dé-carbonation des VUL est un enjeu majeur. Pour donner un ordre de grandeur : le secteur logistique transport en Ile-de-France, mobilise quotidiennement 50.000 camions de plus de 3,5t, et 900.000 VUL (dont 375.000 sont supérieurs au Crit’Air3)[1]

Les adhérents du SNTL sont fortement conscients de la nécessité de la dé-carbonation des flottes. Les adhérents des grandes métropoles, sont les premiers à rechercher les moyens de dé-carboner et à les mettre en oeuvre.

Deux dates butoirs pour les acteurs du secteur :

– la mise en place des ZFE.

– la fin des moteurs thermiques en 2035.

Il s’agit de ne pas confondre les objectifs et les moyens de les atteindre. S’ils partagent les objectifs, les transporteurs légers ont le sentiment que les dates butoirs et objectifs fixés par les ZFE ne seront pas tenables. Aujourd’hui les types de véhicules et les solutions d’approvisionnement sont largement insuffisants pour pallier l’utilisation des véhicules thermiques, et notamment diesel.

Pour la dé-carbonation des VUL, le SNTL préconise un mix énergétique en fonction des utilisations des véhicules. Pour les distances courtes : favoriser l’électrique. Pour les distances longues : tous types de solutions dé-carbonées.

Remarque : la souveraineté en matière de transport impose un mix. Imposer une source unique, revient à devenir dépendant des acteurs et des infrastructures de ce secteur.

Besoin d’accompagnement des professionnels. Le SNTL représente des entreprises transportant pour le compte d’autrui, mais constate que le tissu de PME disposant de flottes propres de VUL, parfois importantes, ont les mêmes difficultés.

Les VUL électriques de tous types sont aujourd’hui très chers (dans des secteurs aux marges très faibles, il faut anticiper l’impact économique de ces changements de flotte). Les craintes sont nombreuses sur la disponibilité des véhicules (entre la commande et la livraison). Si des aides à l’acquisition doivent être envisagées, la crainte est que ces aides augmentent encore le prix des véhicules concernés.

Retours d’adhérents acteurs de la dé-carbonation de leurs flottes de VUL :

Le premier retour est le questionnement sur les sources d’énergie. Il s’agit de ne pas reproduire l’erreur passée de ne dépendre que d’une seule source d’énergie (le diesel), et profiter des questionnements et du foisonnement de propositions pour définir un mix énergétique optimal (pour la planète évidemment et pour l’entreprise également).

Selon le retour d’expérience des adhérents ayant entamé la dé-carbonation de leurs flottes, une segmentation par typologie de transport est indispensable :

  • 1- Urbain courte distance (< 50 km/j) et faibles volumes (< 2m3) : cyclo-logistique. Les VAE cargo ou non sont une réponse extrêmement pertinente aux enjeux. La solution est économique et écologique, mais soulève d’autres problèmes : reconversion des chauffeurs VUL, qualité de l’offre de vélos, uberisation prégnante dans ce secteur, management des coursiers à faire évoluer, emprise urbaine, sécurité.

  • 2- Urbain moyenne distance (< 250 km/j) et/ou volumes plus importants : la propulsion électrique est particulièrement adaptée, même si elle nécessite des adaptations structurelles et organisationnelles des entreprises (infrastructures de recharge, retour des véhicules au dépôt pour recharge, augmentation des investissements pour un TCO identique au thermique, etc…). Aujourd’hui, des solutions d’accompagnement à la conversion des flottes thermique => électrique existent, mais la mise en œuvre n’est pas aisée (cf. frein à l’électrique plus loin)

  • 3- Interurbain (> 250 km/jour) : l’électrique n’est pas une solution, contrairement à ce que les installateurs de bornes de recharge rapide veulent nous faire croire. L’apport exceptionnel de l’électrique est lié à la recharge lors du freinage. Or sur de longues distances, tout ce bénéfice disparaît. La solution est un moteur thermique, mais dé-carboné. Il existe plusieurs possibilités, notamment les biocarburants ou l’hydrogène.

  • 4- Particularité des flottes à température dirigée : les professionnels de cette branche, soulignent, que pour des raisons techniques, il est aujourd’hui encore impossible, à une échelle importante, de garantir une véritable chaine du froid en 4° ou en -20° avec des véhicules dits propres.

  1. Urbain courte distance (- 50km/j) : les enjeux de la cyclo-logistique :

L’offre de véhicule n’est ni étoffée, ni professionnelle. Beaucoup de vélos ont une durabilité moyenne, nécessitent de nombreux entretiens, et tombent régulièrement en panne lors d’une utilisation professionnelle (i.e. au moins 7h/jour).

Les fabricants sont débordés de demande, n’ont pas de plan de production digne de ce nom, et les acteurs de la maintenance ne sont pas dimensionnés pour une utilisation massive des vélos cargo en production.

Ces freins sont majeurs pour des petits acteurs qui n’auront pas la possibilité d’internaliser la maintenance préventive et corrective des vélos (actuellement, en province, l’entretien d’un vélo cargo n’est pas prioritaire vis-à-vis de l’entretien des vélos de particulier chez les mécaniciens vélos).

Par ailleurs, la population de coursier prêts à pédaler 7h/jour dénote notoirement par rapport aux populations de coursiers VUL. L’organisation des entreprises, le management et l’approche sont alors à revoir. Nombre d’entre eux ont pratiqué l’exploitation par Deliveroo et UberEat, et se comportent en mercenaires autoentrepreneurs, loin d’adhérer à des valeurs et visions d’entreprises, nécessaires à une qualité de service requise par la majorité de nos clients.

Le développement de la cyclologistique impose une réflexion sur la défense du modèle social Français, pour le secteur de la logistique-transport du dernier km. Les solutions d’acteurs du digital, qui utilisent des livreurs non-salariés en auto-entrepreneurs se sont multipliés ces dernières années.

Premières condamnations pour travail dissimulé (En France : Tribunal correctionnel de Paris 19.04.2022 c/ Deliveroo – en délibéré : Ministère public c/ Stuart décision janvier 2023 – début du procès Take-it-Easy Tribunal judiciaire de Paris 21 octobre 2022 – En Espagne condamnation de Glovo à une amende de 79 millions d’euros et à la régularisation de 10600 livreurs en salariés).

Enfin, il faut également considérer sur la courte distance, les besoins de transports de volumes importants. Les gros VL ou les PL qui seront utilisés pour les très courtes distances, seront ceux qui effectueront aussi de la moyenne distance, impossible avec des véhicules électriques type Renault Master électrique.

Le GNV sur les Iveco pouvait être la solution mais la fluctuation de 1 à 3 des tarifs du Gaz rend compliquée le gestion de ce type de flottes. Par ailleurs, GNV est-il (sera-t-il dans un avenir moyen) encore considéré comme un carburant propre ?

  • Urbain moyenne distance (- 250 km/j) : les freins actuels à l’électrique

Les freins à l’électrification (dans le cadre d’un mix énergétique pertinent) ne sont ni les infrastructures de recharge, ni l’autonomie des véhicules. La grande majorité des VUL parcourent des distances inférieures à 250 km/jour. Les derniers véhicules électriques proposent des autonomies réelles (en cycle urbain) de l’ordre de 300 km, le sujet de l’autonomie n’est donc pas un blocage – or exception.

Les infrastructures de recharge sont un frein dans la mesure où l’on ne fait pas évoluer nos entreprises : actuellement, la majorité des VUL sont stationnés chez les chauffeurs, sans retour quotidien au dépôt le soir. L’électrification des flottes urbaines nécessitera de modifier les habitudes d’utilisation : un retour au dépôt chaque soir, pour branchement sur des infrastructures électriques dédiées (faisant partie de l’actif des entreprises), permettant un accès une électricité négociée au meilleur tarif – comme nous les entreprises le font actuellement pour le diesel (loin des tarifs élevés constatés sur les bornes publiques).

Ex/ d’adhérent de métropole régionale (Nantes) qui a en interne, une solution de recharge lente (installation électrique classique moyennant l’infrastructure adapéte). Les VUL rechargent la nuit sur 15h, et sont utilisés pendant 9h en journée.

Les réels freins actuels à l’électrification sont :

– l’offre parfois aléatoire de modèles de la part des constructeurs : lorsque Nissan retire du marché sans explication son e-NV200 qui a fait ses preuves comme modèle phare, ou lorsque Renault explique au printemps 2021 qu’ils n’ont pas de modèle à proposer avant 6 mois (pas de tarif, pas de données techniques!) – choisir un modèle pertinent pour son activité relève de la gageure !

– la disponibilité des modèles : certes liée à la crise Covid et la guerre en Ukraine, il n’en ressort pas moins qu’il est compliqué d’obtenir un véhicule pour une PME. D’autant plus quand les grandes flottes trustent une majorité de la production disponible !

– et donc, la réorganisation des entreprises pour permettre la recharge quotidienne…

Spécificités franciliennes : Le développement du réseau de bornes électriques doit toucher autant les centres-villes, dont Paris Centre, que les banlieues y compris lointaines. Beaucoup de livreurs travaillant sur Paris et la proche Banlieue habitent des départements limitrophes (majoritairement 93, 94, 95, 77). Dans le domaine de la messagerie et de la course en IDF, de nombreuses entreprises fonctionnent avec des livreurs salariés, qui sont pour autant propriétaires de leurs véhicules.

  • Interurbain (+ de 25 km/j) : solutions thermiques dé-carbonées :

Le mirage de l’hydrogène ?

Le VUL hydrogène, est en fait un véhicule électrique, sur lequel le constructeur ajoute des bouteilles d’hydrogène (qui grèvent la charge et le volume utiles du véhicule) et une pile à combustible. En brulant l’hydrogène produit de l’électricité, qui charge la batterie (qui se décharge en roulant). L’avantage principal : avec un plein d’hydrogène réalisé en quelques minutes, on parcourt plusieurs centaines de km.

Toutefois, à l’heure actuelle, il y a trop peu d’hydrogène vert disponible. L’hydrogène utilisé dans les quelques véhicules existants est produit à partir d’électricité ou de charbon, par hydrolyse de l’eau. Cette production d’énergie induit une perte conséquente, presque 50% de l’énergie disponible. Dès lors, produire de l’hydrogène à partir d’électricité pour re-fabriquer plus tard de l’électricité est un non-sens, à fortiori si l’électricité n’est pas dé-carbonée ! L’hydrogène est selon nous une solution pas encore mûre, mais un carburant potentiel pour un avenir plus lointain…

Les biocarburants

L’offre de biocarburant évolue rapidement.

Il existe désormais, pour les flottes captives comme les nôtres, des solutions de bio-gazole qui ne nécessitent aucune modification moteur et permette un mélange gazole/bio-gazole.

Cette solution permet de continuer à amortir les véhicules existants, avec une conversion immédiate et évolutive. Elle s’avère donc tout à faire pertinente pour toutes les distances !

Le surcout immédiat est non négligeable, mais la dé-carbonation est quasi-totale.

Il conviendra en revanche de prévoir, dans les règlements de ZFE, la possibilité expresse d’utiliser du biocarburant.

Dans le Sud-Ouest (Bordeaux), exemple d’adhérent ayant passé l’ensemble de sa flotte à l’éthanol.

  • Particularité des flottes à température dirigée :

Il s’agit d’un secteur en pleine expansion, notamment dans les centres urbains aisés.

Garantir une véritable chaine du froid en 4° ou en -20° est aujourd’hui encore impossible à mettre en œuvre à grande échelle, avec des véhicules dits propres.

Les rares VUL électriques frigo sur le marché, ne sont accessibles qu’à des prix prohibitifs. Les problèmes d’autonomie, des puissances de réfrigérations ridicules (environ 50% en dessous des modèles de VUL thermiques) ne permettent de garantir une véritable chaine du froid qu’en hiver ! Les transporteurs du secteur, soulignent qu’au moindre contrôle de température leur responsabilité est engagée.

Ils s’interrogent sur le bilan carbone de batteries électriques de plus de 75Kwh, pour savoir si développer une telle solution ne serait pas une ineptie écologique. Le bilan carbone de ces véhicules, serait plus mauvais que le thermique jusqu’à leur 100 000e km.

Dans le domaine des véhicules à température dirigée, un simple 5m3 frigorifique nécessite d’avoir plus de 75kwh (motricité + froid).

S’il semble acquis que dans le secteur « frigo poids lourd » le GNV serait une solution transitoire, il va falloir impérativement intégrer rapidement à la réflexion, les VUL de 2 à 20m3 qui ne peuvent en l’état actuel de la technique passer en électrique. Le secteur de la livraison alimentaire du dernier kilomètre veut alerter les pouvoirs publics, pour éviter la boucherie sociale, en même temps que les inepties sanitaires.


[1] Source Gatmarif

Télécharger la Contribution du SNTL au GT4 VUL feuille de route dé-carbonation art 301

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