Depuis que la première roue de pierre a foulé le premier chemin de terre pour que soient acheminées à la tribu voisine quelques matières premières, l’Homme n’a cessé de développer son réseau routier. Des voies romaines à la route de la soie en passant par les investissements colossaux du Second Empire et aux autoroutes des années 50, nous voici aujourd’hui les dépositaires de cette longue Histoire de la route.
Pour nous, transporteurs, ces routes sont notre outil de travail. Tous les jours, nos véhicules les arpentent délivrant vivres, médicaments, vêtements ou pièces d’usine aux consommateurs, à l’industrie, aux commerces. Si nous l’utilisons autant, nous l’usons et c’est donc à juste titre que nos charges professionnelles servent à entretenir ce réseau et à contrebalancer les externalités négatives de notre activité. Chaque année, ce sont d’ailleurs 39 milliards d’euros de taxes et impôts diverses qui sont payés par les usagers de la route justement dans cette optique, en théorie du moins.
Car nous pourrions nous étonner de la lente dégradation du réseau routier non concédé. Classée 1ère en 2011 pour l’état de ses routes, selon les critères du Forum Economique Mondial, la France n’est aujourd’hui plus que 7ème. 39 milliards, c’est une somme conséquente qui devrait suffire à entretenir ce maillage indispensable à l’économie française. Mi-mai, la ministre des transports, Elisabeth Borne, annonçait le déblocage d’un milliard d’euros en 2019 afin de rénover plusieurs milliers de kilomètres de routes. 1 milliard sur les 39 ou 1milliard de plus ? La suite nous le dira.
Cette déclaration se télescope avec une seconde annonce de notre ministre de tutelle. La création d’un établissement public nommé « Routes nationales de France » doté d’un financement issu du transport routier pour mener à bien la rénovation du réseau national. Cette « agence des routes » se financera t’elle sur les 39 milliards déjà prélevés ? Ou faut-il s’attendre à une nouvelle idée des magiciens de Bercy qui savent multiplier les taxes comme d’autres les pains ?
Mme la ministre, j’en appelle à votre pleine et entière attention. À travers le prisme de l’opinion publique et des sondages, il est aisé, et même de bon ton, de taxer les professionnels du TRM. Mais notre profession que l’on accuse de tous les maux (accidents, pollution, congestion, etc.) ne pourra supporter (moralement et financièrement) plus de taxes qu’elle n’en paye déjà. La lumière du jour perce à travers nos marges tant celles-ci sont fines et notre profession contribue déjà très largement au budget de l’Etat. Les transporteurs ne sont pas la corne d’abondance dans laquelle on peut puiser joyeusement lorsqu’il s’agit de résoudre un nouveau problème. Alors Mme la ministre pour échapper à cette ritournelle, faites preuve d’originalité. Ou d’imagination. Ou d’audace ? Oui, c’est ça ! De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace !
Hervé Street, Président du Sntl