L’édito du président : le génie français

« En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées ! » en lançant cette campagne de communication en 1973 lors de la crise pétrolière, le jeune ministre des Finances Valéry Giscard d’Estaing ne savait pas encore qu’il venait d’offrir à la politique française son plus beau slogan. Et avec plus de 50 ans d’avance ! Prends ça Nostradamus ! 

Émergeant des cendres fumantes du vieux monde, le « new world » de la « start-up nation » semble, durant cette campagne pour les municipales, avoir convaincu l’ensemble de la classe politique de se lancer dans un gigantesque concours Lépine de l’idée clinquante, chromée mais burlesque. 
Symbole de cette folie ambiante, j’ai nommé la campagne parisienne. À croire que les candidats se sont lancés dans une fuite en avant en laissant dans leur sillage la définition du bon sens comme piétiné par la célèbre charge de la cavalerie française lors de la bataille d’Eylau en 1807.  
Petit florilège. Déplacer la gare du Nord en Seine Saint-Denis, transférer la gare de l’Est à la Villette et la remplacer par un « central park parisien », planter 170 000 arbres (soit 80 par jour sans interruption pendant 6 ans), prêter 100 000€ pour l’achat d’un appartement, supprimer 60 000 places de stationnement (alors que comme chacun sait, il est déjà extrêmement facile de se garer à Paris), acheter 30 000 logements pour les louer ensuite (coût de l’opération 20 milliards d’euros pour un budget annuel de la ville de Paris de 11,4 milliards d’euros), création d’un corps de « managers de rue »… 

J’arrête ici cette litanie qui pourrait faire rire si elle n’était pas si désespérante. La légèreté avec laquelle ces idées sont lancées est la preuve de l’appauvrissement général de la qualité de nos élus. Non pas que nous ayons toujours eu des génies pour nous diriger, mais il me semble que nous avons atteint un pic. Un pic où seul le buzz, l’effet d’annonce ou la force du symbole semble compter au détriment de la proposition d’intérêt général. Un vent de populisme de communiquant traverse l’esprit embrumé et ambitieux des candidats. 
Et lorsque leurs yeux hagards se portent sur la thématique de la mobilité, deux étincelles illuminent mollement l’obscurité. À la mobilité des voyageurs, tous les égards, toutes les folies et toutes les promesses du moment que la voiture est bannie. Pour la mobilité des marchandises, c’est l’inverse. On l’oublie, on l’ignore, on la cache, mais on bannie quand même les véhicules histoire de faire bonne et verte figure. 

Sauf que voilà le problème, nous sommes le maillon clef d’une industrie en plein essor. J’ai nommé le e-commerce. Ce secteur pesait 30 milliards d’euros de chiffre d’affaire en 2010 contre plus de 100 milliards d’euros et plus de 500 millions de colis en 2019. Et la tendance est mécaniquement à la hausse. Le grand public a totalement adopté le principe de la livraison à domicile, que ce soit pour ses courses, ses vêtements ou ses appareils multimédias, de la même façon qu’il a adopté le principe d’être livré le dimanche à 13h ou le mercredi à 22h. Vous voyez où je veux en venir ? Ainsi, dans le même temps nous avons des habitudes de consommation bien ancrées et de l’autre des candidats qui nous cachent comme la poussière sous le tapis. 

Je propose donc deux options à tous les candidats aux élections municipales. Soit ils continuent de nous ignorer et de s’illustrer par de brillantes propositions jusqu’à l’embolie des grands centres urbains ; soit ils prennent conseils auprès des professionnels de la livraison et de la gestion de flux pour qu’ensemble nous puissions imaginer des villes où il fera bon vivre, travailler et respirer. 

Hervé Street, Président du Sntl 

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